Paradox Music

INTERVIEW #014 – Philippe Petit

black and white cover of paradox techno interview with PHILIPPE PETIT
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Pour accompagner ce 18ème épisode de notre séries de mix, Philippe Petit s’est prêté au jeu de nos questions paradoxales. L’occasion d’en savoir plus sur ses influences qui tirent leurs sources dans la black music, son actu, sa vision sur le retour du vinyl, qui n’en est pas vraiment un pour tous les styles et sa collaboration avec Len Faki

  • Hola Philippe, un grand merci d’avoir accepté de répondre à nos questions. Peux-tu te présenter à nos lecteurs ?

Je suis Bruxellois d’origine, maintenant basé dans les montagnes, à Chamonix.

 

  • Quel a été ton parcours en termes d’influence et d’écoute dans le monde très sinueux de la Techno ?

Tout a vraiment commencé à Bruxelles à la fin des années 80/début 90. Des soirées technos dans des lieux inattendus (la Gare Centrale par exemple) avec de la musique – du moins de ce que je m’en souviens – super violente, dans le bon sens du terme. Venant d’un milieu plus métal/punk/hardcore, ca m’a directement parlé. Et puis je suis tombé sur les scènes noires américaines de Detroit, New York et de Chicago et ca m’a tout de suite plu. L’énergie et le funk à l’état brut, retransmis via un beat répétitif : parfait! Un label que j’adore c’est Eight Ball de New York : grosse influence!

  • On a cru comprendre que tu t’es installé à la montagne depuis quelque temps… Est-ce que cela a une influence sur tes productions?

Je ne m’en rends pas compte, mais surement.  Je n’ai jamais composé de musique électronique dans une ville – seulement du métal quand j’habitais à Bruxelles il y a bien longtemps. Donc on va dire : oui !

 

  • Tu es originaire de ce bon vieux plat pays que l’on aime tant chez Paradox… As-tu gardé des liens avec la scène Techno belge ?

Pas vraiment. J’ai quelques bons souvenirs de fêtes avant de partir à Londres en 1995 (Isis 100%  Amsterdam, Garnier au Vaudeville, soirées acid au Café d’Anvers, Stacey Pullen au Fuse en 94) mais rien de particulier.

 

  • Tu es aux manettes de deux labels dont la qualité des sorties est impressionnante. Quelle différence fais-tu entre Knotweed et DMT (Decision Making Theory) d’un point de vue stylistique ?

Merci. En fait je suis assez productif et j’avais juste besoin d’un autre label pour sortir plus de musique. Au départ mon idée était de monter Knotweed juste pour sortir ma propre musique, mais en fait il y a tellement de choses bien qui se font que je me suis aussi mis à produire d ‘autres artistes. Myk Derill est un de mes favoris. DMT est peut être un rien plus « dancefloor », moins expérimental.

  • Le catalogue de Knotweed révèle un joli florilège d’artistes : Terrence Dixon, Myles Sergé, Gonzalo MD pour ne citer qu’eux… Comment se passe la collaboration avec ces artistes?

Simple et efficace. Il m’arrive de prendre contact directement avec des artistes que j’aime bien. Sinon je reçois des morceaux, et si ceux-ci correspondent à mon humeur du moment, on fait quelque chose. Là je ne prépare quasi plus de releases à l’avance. Par exemple, je ne sais pas encore ce qu’il y aura après le prochain Knotweed qui sort cette semaine ou le prochain DMT qui est sorti le mois passé. Du coup je peux être super réactif. Si j’entends quelque chose qui m ‘accroche, je peux le sortir direct – c’est ce qu’on a fait avec Hydergine et Julixo, ou encore avec Gonzalo pour le DMT 006.

  • Tu es déjà à ta deuxième sortie sur Figure, le label de Len Faki. C’est une de tes productions les plus mentales et je trouve les plus abouties.  Penses-tu investir ce genre de sonorités dans le futur ?

Oui, c ‘est vraiment une super collaboration, j’en suis très content. Je lui montre des morceaux, il m’apporte des commentaires constructifs, je les retouche pour arriver finalement à quelque chose qui nous plait à tous les deux. Et vu son expérience de studio et de scène, je lui fait entièrement confiance en ce qui concerne ses remarques sur mes morceaux : il adopte vraiment une casquette de producteur et ca m’aide beaucoup d’avoir une oreille critique externe : parfois je me sens un peu seul avec mes compositions devant le Mont Blanc. C’est Len qui m’a poussé a faire un EP aussi varié que le SPC W qui sort la semaine prochaine, et je suis très content du résultat.

  • Tenir deux labels doit représenter beaucoup de boulot surtout dans le contexte économique actuel. Quels sont les principaux challenges auxquels tu as été confronté dans cette aventure?

Ça ne prend pas tant de temps que ça. Le vrai challenge, c’est l’aspect financier. Si tu peux te permettre de perdre un peu d‘argent, alors tout va bien. C’est un peu cynique comme commentaire, mais c’est la triste réalité.

 

  • On ressent ces dernières années un retour au vinyl. Cela se ressent-il sur les ventes pour des labels comme le tien ?

J’aimerai bien, mais pas du tout. Stagnation totale, voire même recul (c’est peut être différent pour la house ou le rock). Mais j’aime les disques que je sors, donc je continue. C’est les prestations DJ qui permettent de financer mes labels. Je crois/je crains que le problème actuel de la techno est qu’il y a beaucoup de choix et ce n‘est pas facile de se faire remarquer parmi toutes ces sorties.

 

  • Tes sonorités sont teintées d’influences old-school que ce soit au niveau du groove ou de la rythmique. Curieux de savoir si tu travailles plutôt sur Hardware ou sur Software pour tes productions ?

L’aspect old school, c’est sans doute parce que je suis vieux et que donc j’écoute toute sorte de sons depuis très longtemps, ce qui m’influence indirectement. Au niveau des «machines », de mon point de vue c’est tout à fait sans importance. Du moment que ce qui sort sonne bien, on s’en fout de savoir si ca sort d’une TR808 ou d’un software.

 

  • Quels artistes ou labels t’ont le plus marqués en 2015?

Markus Suckut est un de mes favoris. J’ai vu DVS1 pour la première fois l’année passée et il m’a fait la même impression que Jeff Mills en 1995 : la claque! Brendon Moeller  m’avait aussi super plu lors de son passage a Genève il y a quelques années. Ah oui et j’aime bien jouer les productions du Plant Worker – toujours top ! Il y a énormément de bonne musique qui sort pour l’instant, presque trop – c’est difficile de rester au courant de ce qui se fait, mais c’est du coup aussi excitant : il faut de nouveau faire le tri parmi une pile de sorties qui sonnent toutes pareille. D’où l’avantage de passer du temps chez un disquaire qui est de bon conseil! La scène argentine bouillonne toujours, de même que la scène Berlinoise. Ecoute les disques qui sont distribués par mon nouveau distributeur 712 à Berlin, et tu trouveras plein de sons intéressants : I/Y, Elad Magdasi, Compass et j’en passe.

  • Comment décrirais-tu un morceau intemporel en Techno?

Un morceau que tu peux jouer aujourd’hui, il y a 10 ans et dans 10 ans : UR a quelques disques comme ça : Il y en a, mais pas tant que ça (les vieux Suburban Knight par exemple, ou Dark Energy, Ball Park, ou encore Believer de Joris Voorn). Je trouve qu’un des problèmes actuels est que les gens ont la mémoire courte. Tu sors un disque, et 1 mois après il est considéré comme obsolète. C’est bien entendu lié à la technologie. Moi aussi si je n’achète pas un disque, je risque de zapper complètement : les promos se perdent dans mon ordi et je les oublie après 1 semaine. C’est pour ça aussi que j’achète les disques : ça demande un effort, ça prend un peu de place, et donc fatalement tu te souviens mieux de ce en quoi tu as investi physiquement.

  • Comme t’as pu le constater, la vie est truffée de paradoxes. Qu’est ce qu’il te semble le plus paradoxal dans le milieu de la musique électronique?

Je ne vais pas commencer, ca prendrait 10 pages…

 

  • A quoi doit-on s’attendre dans les mois avenirs concernant ton actu artistique ?

Outre le Figure SPC W, j’ai un morceau qui sort bientôt sur le Initial Berlin 002, un chouette label franco-allemand : je suis très impatient de cette sortie. Sinon j’ai vraiment beaucoup de morceaux qui sont prêts, mais je ne sais pas encore quand et ou ils sortiront – à voir! J’espère pouvoir continuer ma collaboration avec Figure : ça me convient vraiment bien.

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