Super échange avec Jiman au détour de son podcast. De ses premiers pas dans les clubs belges à son projet expé RW-1, le nordiste nous retrace son parcours et nous explique sa vision rétro-futuriste de la Techno.
- Salut Jimmy, ravis de t’accueillir dans notre plateforme. Peux-tu te présenter à nos lecteurs ?
Salut, je m’appelle Jimmy, j’ai 31 ans, j’habite près de Lille dans les hauts de France… Je produis et joue de la musique électronique sous le pseudo Jiman.
- On va commencer par aborder ton parcours en termes d’influences musicales. Quels styles ont croisé ton chemin depuis ton enfance et qu’est-ce qui t’as amené à la musique électronique ?
On va dire que j’ai eu un déclic en entendant mon cousin jouer dans sa chambre où je n’avais pas le droit d’aller….ensuite la télé (rediffusion de la techno parade, set de Carl cox, Laurent Garnier, Manu le malin) et une radio locale du nord qui passait beaucoup de techno. Ils retransmettaient des directs de clubs belges, avec les gens qui criaient derrière etc…. Ça me rendait fou (rires). J’ai donc acheté des platines naturellement vers 13/14 ans. J’ai trainé chez les disquaires du coin et quand j’ai pu sortir je suis sorti…. en Belgique. Je pense que c’est vraiment cette radio et la région qui m’a amené à la techno car à l ‘époque j’écoutais aussi NTM. J’aurais très bien pu m’orienter vers le rap. Mes premiers disques étaient donc très techno/hardtechno, Ben Sims, Adam Beyer etc, des labels comme Primate, des producteurs locaux souvent belges comme le label Diki records, Bonzai records, mais aussi Music man, Drumcode, ces choses là.
- Tes productions sont pas mal orientées Dub techno. D’où tiens-tu cette influence ?
Mon grand père est jamaïcain… Non en fait ce n’est pas ma principale influence comme on pourrait le croire…. Je produis depuis plus de 10 ans et j’ai mis un temps fou à trouver le son….. à sonner « comme des tracks que j’achète ». Il s’est avéré que les techniques de production que j’utilisais m’ont fait prendre cette voix. J’ai donc fait au début un peu de la dubtechno sans le vouloir. Aujourd’hui je maitrise un peu plus mes productions et quand je veux faire de la dub j’en fait, et j’en écoute beaucoup plus aussi du coup…. Mais je ne m’arrête pas à la dubtechno en terme de prod, mais j’aime bien, oui.
- Pas mal d’actu ces derniers mois pour Jiman… Après le Nowhere en 2015, il y a eu un vinyl sur Forsaken Cell et un autre sur le label marseillais Mize Records. De quels autres labels te sens-tu le plus proche musicalement ?
J’aime beaucoup Singular, le label de Marcelus, Construct Re-form celui de Zadig, CLFT MILITIA, Exploration Music pour ceux qui est de la France. J’écoute pas mal de chose et achète beaucoup de vieux disques en ce moment donc fatalement Tresor, Purpose Maker, Bush, Globaltrax, Novamute, Compound, Avian pour ce qui est de l’actuel pour certaines choses comme SHXCXCHCXSH mais y en a tellement, Subosc le label de Kaelan…. Dès que j’achète un disque je m’en sent proche donc la liste est longue….. Basic Channel, O Ton, Art Less, Echochord, Infrastructures, Downwards, Osiris Music, Granulart, Espo, Samurai Music, LIES, Gynoid, et puis parfois tu n’aimes pas forcément un label mais tu vas kiffer un EP, donc c’est difficile de faire une liste représentative de ce que je joue…. Sans parler des disques où il n’y a rien d’écrit dessus (rires).
- Tu as récemment annoncé la naissance d’un side project aux accents plus industriels. Que peux-tu nous dire sur ce projet ?
Oui, RW-1. Une autre approche de la techno, plus expérimentale, avec beaucoup plus de sound design, plus d’âme, de mélodies, des choses plus profondes et personnelles, moins raw et dub. Je me force par exemple à ne pas mettre de chords (rires). C’est un projet d’album, il est bientôt fini. Je ne sais pas s’il sortira sous Jiman ou RW-1. Je ne sais pas si ça sortira d’ailleurs, mais l’ensemble est cohérent pour l’instant. Tout est dans le même moule mais c’est un projet beaucoup plus libre…
- Tu es donc originaire et basé dans le Nord, et quand on évoque cette région, on ne peut s’empêcher de penser à la Belgique et ses clubs. Je suppose que t’as dû y passer quelques soirées… Quels spots t’ont le plus marqué ?
Je suis beaucoup sorti plus jeune dans des clubs situés à la frontière oui. LAGOA, par exemple, où j’ai vraiment appris comment se jouait la techno. Des guests internationaux y venaient régulièrement, un des résidents du club avait une émission sur la radio dont je parle plus haut… Technopolys, j’y ai vraiment découvert pas mal de choses….j’allais aussi dans les mêmes disquaires que ces DJ’s, et j’achetais des Steve Stoll que je joue encore aujourd’hui sans savoir qui c’était à l’époque. Plus tard, il y a eu le KIOSK à Lille qui restera pour moi le meilleur club qu’il y a eu à Lille. Un truc assez roots, un gros melting pot Lillois, du bobo au punk à chiens. Le son était crade, la boite aussi (rires) mais l’ambiance folle. J’ai vraiment passé de bonnes soirées là-bas et c’était très ouvert d’esprit sur la prog…Le fuse aussi à bruxelles mais j’y suis allé très peu… ça commençait à faire loin. Je suis beaucoup sorti à l’H20 aussi, on y allait pour la petite salle house où il y avait une ambiance de taré …. à 8 heures c’était encore full et tout le monde hurlait…
- Peux-tu nous parler de la scène lilloise actuelle ?
Je la cherche encore aha…. J’y suis allé pour la fête de la musique olalala…. mais à côté de ça en ce moment il y a pas mal de jeunes collectifs très motivés par cette musique car c’est à la mode depuis quelque temps… donc c’est assez cool. Il y a des bonnes choses parfois comme un after qu’avait organisé Osmoz collective, vraiment cool, les once upon mais globalement ils ont du mal a trouver des lieux et se retrouvent souvent à jouer dans des bars ou des clubs improbables pas fait pour la techno…. Il y a le Moog Analogic bar qui laisse vraiment quartier libre quand tu y joues et l’ambiance est super sympa. Il doit y a voir d’autres choses mais je ne suis pas un vrai Lillois non plus donc je ne sors pas si souvent que ça là-bas…. mais pour trouver notre dose de choses comme on aime, on est plus amené à aller jusqu’à Amsterdam ou descendre à Paris.
- On a cru comprendre que ton principal support de mix était le vinyl. Avec cette vague d’hyperproduction depuis quelques années, pas facile de se retrouver dans toutes ces sorties hebdomadaires. Comment fais-tu pour rester toujours à la page ? Plutôt on-line ou magasins de disques ?
Je ne suis pas certain d’être vraiment à la page (rires). Généralement une fois par mois je prends quelques jours pour faire une commande de disques, en fonction du budget neuf ou occasion. Je passe énormément de temps à tout écouter. En ce moment j’achète beaucoup de vieille Techno. Il y a vraiment des disques incroyables quand tu cherches bien …… avec un groove qu’on a du mal à retrouver aujourd’hui. Et j’aime bien les choses perchées aussi, expé, avec un gros sound design, ça reste une musique portée vers le futur à la base donc c’est important.
- Comment as-tu construit le mix pour Paradox?
Nous avons une émission de techno sur une radio locale dans le pas-de-calais « banquise fm » , chaque dimanche nous animons « la fonderie » j’en profite pour y enregistrer tous mes podcasts. Comme je t avais dit je voulais faire un mix paradoxal forcément (rires), donc le mix alterne entre techno binaire et choses plus breakées et perchées. Il y a quelques surprises, des nouveaux disques, des vieux, il y a un peu de tout, ça représente assez bien ma façon de jouer, c’est assez brut…. C’est pas de l’autoroute enfin je ne pense pas, je déteste me faire chier quand je mixe et quand j’écoute qqn aussi…
- Qu’est ce qui te paraît le plus paradoxal dans le monde Techno ou de la musique électronique en général?
Rien en particulier. Comme je disais, c’est une musique qui devrait aller plus dans l expérimentation, dans le futur. En même temps, je te dis ça et 60% de mon bac est fait de disques qui ont 10-15 ans. Ça c’est paradoxal (rires), je remarque aussi qu’il y a des disques de cette époque qui sont bien plus futuristes que ce qui sort aujourd’hui dans la masse on a un peu régressé qualitativement. On va vite s’enflammer sur un gros kick et un synthé. Il y a moins de recherches dans le son à mon sens…. C’est pour ça que je passe un temps fou à chercher des tracks, avec une âme….. Il faut qu’il se passe quelque chose, ça peu être une boucle de 5 min. Je m’en fous si le sound design fracasse, si y a pas de sound design faut que la track aies des couilles…. C’est ma vision.
- Les plaques qui quittent rarement ton bac à disques ?
Après chaque set, je le vide intégralement donc c’est jamais le cas… Je prend systématiquement mes sorties mais je ne les joue jamais (rires). Après, je ne suis pas le mec le plus booké de la terre non plus.
- Un petit mot sur tes futurs projets…
L’album sous RW-1 est quasi fini. Notre projet en duo avec le pote Seb avance aussi doucement mais sûrement, un projet live, full machine, sans laptop, ça s’appelle Sigman. On doit avoir 6-7 tracks. Je compose en moyenne une track par semaine donc il y a beaucoup de choses…..